Un, deux, trois, sommeil

Après un interminable printemps pluvieux, la ville de Pau savoure les premières heures ensoleillées. Dans son bureau du commissariat central de la rue O’Quin, le commissaire Jens Holtan peine à sortir de sa longue hibernation. Les affaires se suivent et se ressemblent, maussades et ennuyeuses comme des après-midi de pluie sur le Béarn. Et pour corser le tout, les premiers beaux jours s’installent sur la ville, annonciateurs de tout ce qu’Holtan exècre, plage, chaleur, sable et montagnes tourmentées par des orages sans fin.
Ce qu’il ignore, c’est que dans moins d’une minute, sa partenaire, le lieutenant Inès Nieves va surgir dans son bureau. Ce qu’il ne peut deviner, c’est qu’une fois la porte refermée, quand elle aura posé l’enveloppe kraft devant lui, à cet instant précis, sans qu’il en ait conscience, s’écouleront les dernières secondes de calme de ce mois de juin 2013.
Dans l’enveloppe l’attend la photographie d’un corps inerte. Un homme suicidé dans son salon. Un notable du coin. Un corps sans vie, photographié à son domicile. Un corps à même le cuir fauve de son canapé de standing. Une existence à bout de souffle, songera Holtan. Suffisamment à bout pour décider qu’il n’y a plus de jours à vivre. Un corps allongé, une posture étrange. Décidément, se dira Jens Holtan, les vents du Nord vont souffler tout l’été...